Extrait de Fauves (2010)
Inclassable, bien qu’inscrit dans le champ chorégraphique, Michel Schweizer opère dans ses différentes créations un croisement naturel entre la scène, les arts plastiques et le champ du réel. Sa pratique consiste à décaler les énoncés et à réinjecter une réalité sociétale ou humaine sur scène, convoquant des communautés provisoires, boxeurs, strip-teaseuses, maîtres chien, danseurs classiques (Cartel, 2013) ou encore architectes (Primitifs, 2015). Cheptel s’inscrit dans la continuité du projet Keep calm, mené depuis 2015 par Michel Schweizer avec des groupes d’enfants et de préadolescents et dont une édition s’est constituée à Pau en 2016. Un premier temps d’élaboration conduit les enfants à formuler leurs réflexions, sentiments, questions sur leur expérience du monde. Tout l’enjeu consiste ensuite à créer pour eux les conditions d’une expérience vive sur le plateau, à entretenir leur présence dans un haut degré d’authenticité, de spontanéité et de vérité. Cheptel est un espace privilégié dans lequel huit pré-adolescents, trois garçons et cinq filles, occupés à une observation soutenue de notre monde s’adressent aux adultes responsables que nous sommes. Munis d’un kit de survie en milieu hostile, accompagnés d’un « vieux sage », ils s’aventurent dans l’espace de la forêt, se retranchent dans une zone protégée du cheptel, masse indivise du public adulte, et par la manifestation d’une parole en liberté, nous rappellent à notre condition de sujet du monde.
Production 2017 La Coma / Coproduction Théâtre d’Arles – scène conventionnée pour les nouvelles écritures, Théâtre de Lorient – centre dramatique national, Théâtre de Saint-Quentin-en-Yvelines – scène nationale, Carré-Colonnes – scène cosmopolitaine Saint-Médarden- Jalles et Blanquefort, Espaces Pluriels – scène conventionnée Pau, OARA (Office artistique régional nouvelle Aquitaine) / Accueil en résidence La Manufacture Atlantique – Bordeaux, Théâtre des Quatre Saisons – scène conventionnée musiques, Gradignan, Le Cuvier – CDC d’Aquitaine, Théâtre d’Arles – scène conventionnée pour les nouvelles écritures, Centre départemental de créations en résidence – Conseil Départemental des Bouches-du-Rhône, Espaces Pluriels – scène conventionnée Pau, TnBA – Théâtre national de Bordeaux en Aquitaine.
Inclassable, bien qu’inscrit dans le champ chorégraphique, Michel Schweizer opère dans ses différentes créations un croisement naturel entre la scène, les arts plastiques et le champ du réel. Sa pratique consiste à décaler les énoncés et à réinjecter une réalité sociétale ou humaine sur scène, convoquant des communautés provisoires, boxeurs, strip-teaseuses, maîtres chien, danseurs classiques (Cartel, 2013) ou encore architectes (Primitifs, 2015). Cheptel s’inscrit dans la continuité du projet Keep calm, mené depuis 2015 par Michel Schweizer avec des groupes d’enfants et de préadolescents et dont une édition s’est constituée à Pau en 2016. Un premier temps d’élaboration conduit les enfants à formuler leurs réflexions, sentiments, questions sur leur expérience du monde. Tout l’enjeu consiste ensuite à créer pour eux les conditions d’une expérience vive sur le plateau, à entretenir leur présence dans un haut degré d’authenticité, de spontanéité et de vérité. Cheptel est un espace privilégié dans lequel huit pré-adolescents, trois garçons et cinq filles, occupés à une observation soutenue de notre monde s’adressent aux adultes responsables que nous sommes. Munis d’un kit de survie en milieu hostile, accompagnés d’un « vieux sage », ils s’aventurent dans l’espace de la forêt, se retranchent dans une zone protégée du cheptel, masse indivise du public adulte, et par la manifestation d’une parole en liberté, nous rappellent à notre condition de sujet du monde.
La Coma / Conception, scénographie et direction Michel Schweizer / Collaboration artistique Cécile Broqua / Travail vocal et musical Dalila Khatir / Collaboration chorégraphique Ghyslaine Gau / Création lumière Eric Blosse / Conception sonore Nicolas Barillot / Régie générale Jeff Yvenou / Référent pédagogique Jean-Noël Obert / Direction de production et de diffusion Nathalie Nilias / Administration Hélène Vincent / Avec Zakary Bairi, Aliénor Bartelmé, Bruno Béguin, Lise-Anne Bouchereau, Hélie-Rose Dalmay, Anouk Lemaine, Zoé Montaye, Rémi Plages, Nils Teynié / Crédit photos Frédéric Desmesure
La Coma
Créée en 1995 et ironiquement identifiée comme CENTRE DE PROFIT en 2003, LA COMA
reste une modeste entité culturelle implantée en Aquitaine, destinée à couvrir la diversité
des pratiques artistiques (créations / performances / workshops…) que Michel Schweizer
s’applique à développer en direction des publics et en faveur d’une redéfinition de la
notion de « profit ». Faire qu’on puisse penser collectivement la nécessité d’un espace
public où le temps passé serait le bénéfice d’une expérience culturelle, sociale et/ou
artistique, suppose alors de penser toute action artistique comme une expérience sensible
(sociale) et esthétique (artistique), capable de redynamiser du désir désintéressé chez
chacun d’entre nous. Pour ce faire, depuis 19 ans, LA COMA ne saurait envisager autrement
son travail que dans une attitude et une entreprise de résistance politique à un climat social
bien délétère…
Inclassable, bien qu’inscrit dans le champ chorégraphique, Michel Schweizer opère dans
ses différentes créations, un croisement naturel entre la scène, les arts plastiques et une
certaine idée de « l’entreprise ». Sa pratique consiste à décaler les énoncés et à réinjecter
une réalité sociétale ou humaine sur scène, en admettant avec pessimisme ce qu’on ne
peut admettre : les institutions culturelles et les oeuvres sont une affaires de « business ».
Créations Michel Schweizer (1998-2013)
Primitifs (2015)
Cartel (2013)
Fauves (2010)
Ôqueens [a body lab] (2008)
Bleib-opus#
3 (2006)
Bleib-showroom
opus #1 et #2 (2005-2006)
Clean (2004)
Scan [more business, more money management] (2003)
Chronic(s) (2002)
Production déléguée : compagnie Hors-Série/Hamid Benmahi
Kings (2000-2001)
Assanies (1998)
Préambule 1.
Je vais faire une expérience… Traverser des expériences serait devenu, avec le temps,
un besoin fondamental, car je constate de plus en plus clairement que mon horizon est
occupé par ce besoin qui, très vite, génère un mouvement, une impulsion, des promesses,
des enjeux. C’est une orientation qui m’invite à mettre un pied dans l’inconnu sans
véritablement maîtriser la direction que va me faire prendre cette décision. J’ai provoqué
des réunions humaines parfois improbables, en accompagnant ces collectifs éphémères
dans des entreprises artistiques animées, entre autres, par l’urgence à restaurer la « qualité
du vivant » constitutive de nos trajectoires de vie. J’ai fait et refait cela en observant la
lente dégradation qui s’opérait au dehors. La désunion grandissante entre le sujet et sa
relation au vivant… Estimant malgré tout que la vigilance, la lucidité, l’écoute de soi propre
à chacun nous laissaient une chance de ne pas nous détacher facilement de ce qui nous
constitue en monde et en relation au monde…
Préambule 2.
La nécessité de tenter aujourd’hui une collaboration particulière avec un groupe de
préadolescents est une suite naturelle des rencontres que j’effectue depuis 2014 avec des
groupes d’enfants (âgés de 9 à 11 ans) autour d’une proposition intitulée KEEP CALM. Cela
fait plus de deux ans maintenant, que je propose à des enfants de situer leurs l’observation
de ce qui les entoure à travers une activité qui les conduit à formuler leurs réflexions,
sentiments, questions sur leur expérience du monde tel que l’univers des adultes en définit
les contours. Mais la remarque de Christiane Singer trouble quelque peu ma dynamique
entreprise « Les enfants étaient heureux jusqu’à qu’on leur demande pourquoi… ».
Différentes structures culturelles ont jusqu’à aujourd’hui favorisé ces rencontres qui
aboutissaient non pas à un spectacle, mais à un moment court où enfants et adultes se
faisaient face. Selon un protocole simple, l’enfant se trouvait en capacité de s’adresser à
l’adulte afin de lui faire partager une somme de commentaires susceptibles de rappeler
à ce dernier sa condition d’adulte responsable… Mon constat récurrent, au cours de ces
temps partagés avec ces enfants, fut qu’il ne leur était pas aisé d’être et de dire face
l’attention et l’écoute soutenue qu’un adulte pouvait leur consacrer. Que le face à face
qu’instaurait cette situation mettait à l’épreuve leur pratique et usage du langage, leur
fréquentation du vivant, du rapport à l’altérité qu’elle induisait. L’un des enjeux de cette
expérience fut donc de créer progressivement des conditions et une forme d’entrainement
qui s’attachaient à entretenir ces enfants dans un haut degré d’authenticité, de spontanéité,
de vérité à travers une situation qui leur procure, dans un cadre protégé, un sentiment de
liberté.
Fort de l’enseignement que m’ont apportées ces rencontres, il m’apparaît aujourd’hui
nécessaire de développer une proposition spectaculaire qui mette face à face
préadolescents / adultes et évite les écueils d’une telle entreprise : le préadolescent dans
un rôle au service d’une volonté d’auteur dominante, porteur de propos qui dépassent sa
maturité réflexive, asservi à une représentation de soi dont il ignore le dessein véritable…
Que dans ce lieu du théâtre, qui par essence a la faculté de dénaturer le vivant ou du
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moins d’entretenir avec celui-ci
de troublants arrangements, cette communauté de
préadolescents nous apporte avec un fort degré de vérité l’évidence que leur disponibilité
psychique est occupée principalement à une observation soutenue du monde et de notre
contribution à ses reliefs complexes… Dans ces conditions, il est probable que la nature
singulière de ce vis-à-
vis
nous rappellera notre condition de sujet du monde et notre
responsabilité tutélaire…
Donner un sens à mon activité sociale, de ma place d’éducateur, de citoyen et d’artiste,
pourrait aujourd’hui pleinement se justifier à travers le modeste enjeu politique de ce projet
particulier intitulé CHEPTEL.