En ouverture de sa saison 2018/2019, la scène Espaces Pluriels propose une soirée combinée danse, cirque et exposition qui met l’accent sur les nouvelles écritures et les croisements disciplinaires. Les circassiens Elsa Guérin et Martin Palisse, le chorégraphe Amala Dianor et le chorégraphe et réalisateur Vincent Dupont sont invités. Ce premier rendez-vous donne le ton de la saison, mettant en regard des projets originaux, inventifs et sensibles qui conjuguent à la rigueur formelle une énergie communicative, un dépouillement non dépourvu de fantaisie, une singularité qui intrigue. Pour partager avec vous ce moment de découverte et de convivialité, un buffet est offert à l’entracte.
MAN REC
« Man Rec » signifie « seulement moi »
en wolof, la langue la plus parlée au
Sénégal, d’où est originaire Amala Dianor.
Ce solo propose un dialogue entre les
origines multiples du chorégraphe, des
danses urbaines à la danse contemporaine
en passant par les danses africaines, qu’il
conjugue au singulier. Le point de départ de
Man Rec est la nature complexe de l’individu :
son identité, son rapport à l’autre et à la
société. Unique et fluide, la danse d’Amala
Dianor mélange les genres avec grâce.
En résulte une pièce sobre et poétique,
aperçu sincère de sa recherche gestuelle.
Nul doute qu’elle vous donnera l’envie
de découvrir ses deux pièces de groupe
présentées à l’occasion du temps fort
Résonance(s) : New School et Quelque part
au milieu de l’infini.
http://amaladianor.com/
POST
Depuis l’origine de leur compagnie, le
Cirque Bang Bang fondé en 2006, Elsa
Guérin et Martin Palisse recherchent la
théâtralité dans le jonglage. Mêlant le
jonglage au déplacement, ils ont mis au point
la technique du « vol jonglé » qui révèle le
potentiel chorégraphique et dramaturgique
de cette discipline. Le duo Post décline en
trois tableaux la relation à deux, un drame
humain sublimé par les guitares post-rock
saturées des canadiens Godspeed You !
Black Emperor et The Silver Mt Zion.
Du charme hypnotique d’un lancé sériel
à la charge émotionnelle d’un final
mélancolique, en passant par le comique
absurde du jeu sur la contrainte, le Cirque
Bang Bang s’engage dans un renouvellement
du jonglage avec une farouche pertinence.
http://www.sirquenexon.com/
CILLEMENT
L’exposition Cillement rassemble deux
œuvres filmiques de Vincent Dupont réalisées
en collaboration avec Vincent Bosc, SAM
et DDD, encadrées d’une série de photos
extraites de spectacles du chorégraphe.
Capables tour à tour d’une douceur et
d’une violence extrêmes, contenues dans
les limites de dispositifs dramaturgiques et
scénographiques rigoureusement définis,
les pièces de Vincent Dupont nous convient
à habiter poétiquement le monde. Pour
SAM, trois films mettent en parallèle trois
personnages intégralement costumés,
extraits des spectacles Souffles, Air et Mettre
en pièce(s). Ralentir la vitesse d’exécution
du mouvement révèle ici ce que l’œil ne
peut percevoir en vitesse normale, portant
l’attention sur les vibrations du corps, la
densité de l’air, la réaction du costume ou
de la peau. Dans le quatrième film projeté,
DDD, ce sont des visages ralentis dans leurs
expressions, dans leurs intentions, qui se
composent et se décomposent, aux sons
de bouches qui se forment et se déforment,
dans un cadre mouvant.
http://vincentdupont.org/fr/
MAN REC
Production Cie Amala
Dianor/Kaplan •
Coproduction CNDC Angers,
avec le soutien de la DRAC
Pays de la Loire et la Ville
d’Angers • Solo créé le 14
juillet 2014 en Avignon,
dans le cadre de la Belle
Scène Saint-Denis • Amala
Dianor, est artiste associé
à POLE SUD, CDCNStrasbourg,
dans le cadre
du dispositif soutenu par le
ministère de la Culture et
de la Communication, et à
l’association Scènes de Pays
dans les Mauges (2016-
2019) • La compagnie Amala
Dianor est conventionnée
par la DRAC des Pays de
la Loire, soutenue par la
Région des Pays de la Loire
et la Ville d’Angers
POST
Production Cirque Bang
Bang • Coproduction
Sémaphore scène
conventionnée de Cébazat,
La Passerelle à Pont de
Menat, Théâtre de Cusset
scène conventionnée •
Soutiens Le Sirque Pôle
national des arts du Cirque
de Nexon en Limousin,
Coopérative 2rue2cirque
à Paris / Ville de Cébazat,
Conseil Général du Puy de
Dôme, Conseil Régional
d’Auvergne • Ce projet a
reçu l’aide à la création du
Ministère de la Culture DGCA
et l’aide à la production
dramatique de la DRAC
Auvergne • Créé le 15 août
2011 au Festival La Route
du cirque à Nexon, Le Sirque
Pôle national des arts du
cirque de Nexon en Limousin
CILLEMENT
Production J’y pense souvent
(…) • Coproduction ICI—CCN
Montpellier, Occitanie/
Pyrénées-Méditerranée -
Direction Christian Rizzo,
La Ménagerie de Verre, Paris
En ouverture de sa saison 2018/2019, la scène Espaces Pluriels propose une soirée combinée danse, cirque et exposition qui met l’accent sur les nouvelles écritures et les croisements disciplinaires. Les circassiens Elsa Guérin et Martin Palisse, le chorégraphe Amala Dianor et le chorégraphe et réalisateur Vincent Dupont sont invités. Ce premier rendez-vous donne le ton de la saison, mettant en regard des projets originaux, inventifs et sensibles qui conjuguent à la rigueur formelle une énergie communicative, un dépouillement non dépourvu de fantaisie, une singularité qui intrigue. Pour partager avec vous ce moment de découverte et de convivialité, un buffet est offert à l’entracte.
MAN REC
« Man Rec » signifie « seulement moi »
en wolof, la langue la plus parlée au
Sénégal, d’où est originaire Amala Dianor.
Ce solo propose un dialogue entre les
origines multiples du chorégraphe, des
danses urbaines à la danse contemporaine
en passant par les danses africaines, qu’il
conjugue au singulier. Le point de départ de
Man Rec est la nature complexe de l’individu :
son identité, son rapport à l’autre et à la
société. Unique et fluide, la danse d’Amala
Dianor mélange les genres avec grâce.
En résulte une pièce sobre et poétique,
aperçu sincère de sa recherche gestuelle.
Nul doute qu’elle vous donnera l’envie
de découvrir ses deux pièces de groupe
présentées à l’occasion du temps fort
Résonance(s) : New School et Quelque part
au milieu de l’infini.
http://amaladianor.com/
POST
Depuis l’origine de leur compagnie, le
Cirque Bang Bang fondé en 2006, Elsa
Guérin et Martin Palisse recherchent la
théâtralité dans le jonglage. Mêlant le
jonglage au déplacement, ils ont mis au point
la technique du « vol jonglé » qui révèle le
potentiel chorégraphique et dramaturgique
de cette discipline. Le duo Post décline en
trois tableaux la relation à deux, un drame
humain sublimé par les guitares post-rock
saturées des canadiens Godspeed You !
Black Emperor et The Silver Mt Zion.
Du charme hypnotique d’un lancé sériel
à la charge émotionnelle d’un final
mélancolique, en passant par le comique
absurde du jeu sur la contrainte, le Cirque
Bang Bang s’engage dans un renouvellement
du jonglage avec une farouche pertinence.
http://www.sirquenexon.com/
CILLEMENT
L’exposition Cillement rassemble deux
œuvres filmiques de Vincent Dupont réalisées
en collaboration avec Vincent Bosc, SAM
et DDD, encadrées d’une série de photos
extraites de spectacles du chorégraphe.
Capables tour à tour d’une douceur et
d’une violence extrêmes, contenues dans
les limites de dispositifs dramaturgiques et
scénographiques rigoureusement définis,
les pièces de Vincent Dupont nous convient
à habiter poétiquement le monde. Pour
SAM, trois films mettent en parallèle trois
personnages intégralement costumés,
extraits des spectacles Souffles, Air et Mettre
en pièce(s). Ralentir la vitesse d’exécution
du mouvement révèle ici ce que l’œil ne
peut percevoir en vitesse normale, portant
l’attention sur les vibrations du corps, la
densité de l’air, la réaction du costume ou
de la peau. Dans le quatrième film projeté,
DDD, ce sont des visages ralentis dans leurs
expressions, dans leurs intentions, qui se
composent et se décomposent, aux sons
de bouches qui se forment et se déforment,
dans un cadre mouvant.
http://vincentdupont.org/fr/
Man Rec
Chorégraphie et interprétation Amala Dianor • Assistante
à la chorégraphie Rindra Rasoaveloson • Musique Awir Leon •
Régie technique Nicolas Tallec • crédits photos jef rabillon
Post
Conception, mise en scène et jeu Elsa Guérin et Martin
Palisse • Collaboration artistique Romuald Coll inet, Manu
Deligne • Lumière et scénographie Elsa Guérin & Martin
Palisse • Régie lumière et son Manu Deligne • Musiques du
spectacle Godspeed You ! Black Emperor, Plastikman, Thee
Silver Mount Zion Orchestra & Tralala Band • crédits photos ludovic combe
Cillement
SAM - Film avec Claire Picard (Souffles), Vincent Dupont (Air), Raphaël Dupin (Mettre en pièce(s)) • Réalisation Vincent
Dupont, Vincent Bosc • Image Vincent Bosc • Composition
musicale Joël Grare • Son Maxime Fabre • Conception
costumes Laurence Alquier (Air), Éric Martin (Souffles et
Mettre en pièce(s))
DDD - Film avec Olivia Grandville, Émi lie Labédan, Charlène Sorin Réalisation Vincent Dupont, Vincent Bosc • Image Vincent
Bosc • Son Maxime Fabre • crédits photos cie jyps
AMALA DIANOR
Danseur hip hop, Amala Dianor suit en 2000 un parcours de formation au Centre national de danse contemporaine d’Angers (CNDC). Il travaille par la suite comme interprète pour des chorégraphes aux univers très différents (hip hop, néo-classique, contemporain et afro-contemporaine) puis obtient par la suite une reconnaissance indéniable dans le monde de la danse. Au cours de ces années, Amala Dianor construit son écriture : il passe d’une technique à une autre avec virtuosité, mais c’est la rencontre de ces mondes qui l’attire. Au sein du Collectif C dans C il chorégraphie (ou co-chorégraphie) et interprète ses premières pièces. En 2012, il crée Crossroads (2e et 3e prix concours Reconnaissance) et c’est aussi l’occasion pour lui de monter sa propre compagnie, la compagnie Amala Dianor, au sein de laquelle il développe son travail chorégraphique. L’année suivante il créé Parallèle, un quatuor féminin au Centre National de la Danse. Puis en 2014, il chorégraphie avec BBoy Junior le duo Extension, une rencontre surprenante entre ces deux personnalités du hip hop français. Cette même année il crée et interprète son premier solo, Man Rec, présenté au festival d’Avignon. En 2015, la compagnie porte un projet régional nommé Clin d’oeil du temps destiné à 18 danseurs amateurs en voie de professionnalisation. De ce projet découle la création Overflow co-signée avec Mickael Le Mer, Pierre Bolo et Annabelle Loiseau. Amala Dianor est aussi artiste en résidence pour deux ans au Théâtre Louis Aragon à Tremblay-en-France (93). En janvier 2016, il créé la pièce De(s)génération au Théâtre Louis Aragon de Tremblay en France, sextet qui rencontre plusieurs générations de danseurs hip-hop et en extrait le trio New School qui s’inspire de la danse Abstract. En novembre 2016, il créé le trio masculin Quelque part au milieu de l’infini en s’appuyant sur le thème qui lui est cher, celui de la rencontre. Son travail sera repéré par le Centquatre-Paris ce qui lui permettra d’en être artiste associé jusqu’en mai 2018. D’une rencontre avec le calligraphe nantais Julien Breton en 2017 et la danseuse Sarah Cerneaux, naîtra la création Trait d’union en janvier 2018 qui mêle light painting et danse.
Amala Dianor fait s’envoler la danse hip-hop
Issu de la culture street et formé à la danse contemporaine, ce chorégraphe d’origine sénégalaise déploie un langage singulier qui transcende les genres. Il est à découvrir d’urgence au Centquatre cette semaine. Lorsqu’on lui demande de définir son style, Amala Dianor explique dans un grand sourire : « Quand j’ai commencé, mon slogan était : « décoder la danse hip-hop et investir la danse contemporaine d’une énergie hiphop ». En fait, je travaille souvent avec des puristes, dont je détourne la technique. Ma recherche se situe dans cette transgression ». Unique et fluide, la danse d’Amala Dianor mélange effectivement les genres, puisant son énergiedans des influences africaines, street dance et contemporaines. A l’image de sa vie.
La découverte de Paris et du hip-hop
Né à Dakar, où la danse fait partie de la vie quotidienne, il découvre les danses urbaines en 1983 lorsqu’il arrive en France à l’âge de sept ans. « Vivre à Paris a été une rupture. Je devais rester à la maison, tout était cadré, confie-t-il avec une pointe d’amertume. La découverte du hiphop a été le début du nouvelle vie ». Dans la cour de récré, il imite les pas observés dans H.I.P. H.O.P., l’émission de street dance diffusée le dimanche sur TF1, et s’inspire de l’énergie de Michael Jackson et Bruce Lee, ses modèles. Même s’il danse surtout pour s’amuser, il se fait peu à peu un nom dans le milieu très compétitif de la danse hip-hop. Pourtant, se sentant trop à l’étroit, il décide à la fin des années 1990 de s’affranchir des codes et figures imposés par les pontes du genre.
Les débuts artistiques et les prix
Sa créativité et sa soif intarissable de défi le poussent à intégrer en 2000 le Centre National de danse contemporaine (CNDC) d’Angers. Un tournant qui marque le début de sa démarche artistique. Seul street dancer de sa promotion, il doute de sa légitimité dans cette école prestigieuse, « j’étais surpris de faire partie des meilleurs éléments, malgré mes lacunes techniques en classique et contemporain », confie-t-il sans fausse modestie. Son approche rare du mouvement lui vaut d’être recruté par Régis Obadia à l’issu de la formation. Commence alors une carrière d’interprète, rythmée par des collaborations avec des chorégraphes de renom, tels Abou Lagraa et Emmanuel Gat, qui vont élargir encore un peu plus sa vision du geste dansé. En 2004, il créé C dans C, qui vise à élaborer un style hybride, fusion de la technique hip-hop et contemporaine. De ce collectif naîtra la pièce Crossroads (2012), récompensée par le 2e et 3e prix concours de danse contemporaine Reconnaissance. Une réussite qui annonce aussi les débuts de la compagnie Amala Dianor.
Harmonie humaine
Dans ses pièces, Amala Dianor choisit ses danseurs pour leur sensibilité singulière et leur accorde une grande liberté. Il assume : « J’aime bien être interpellé par la personnalité d’un artiste. Sur scène, je donne avant tout à voir des individus qui s’expriment ». Une harmonie humaine sur scène et en coulisses, comme le confirme Sandrine Lescourant, interprète dans son avant dernière création, De(s)génération (2016). « Il a une belle âme, il irradie. En tant que chorégraphe, collaborer avec lui me rappelle que malgré toutes les contraintes liées à métier, on peut être transparent et bienveillant avec son équipe ». Avec Man Rec (2014), le chorégraphe s’essaye à l’exercice périlleux du solo. En résulte une pièce sobre et poétique, aperçu sincère de sa recherche gestuelle. Puis en 2016, grâce à De(s)génération, il rend hommage à l’état d’esprit du hip-hop qui l’a porté dans toute sa carrière sous l’emblème : « Peace, Unity, Love, and Having Fun ».
Vers l’infini
Pour son dernier essai chorégraphique, Quelque part au milieu de l’infini, il monte sur scène avec deux danseurs mûs par une même quête : se surpasser. « Mes interprètes me ressemblent, avoue Amala Dianor. Ils pourraient se contenter de ce qu’ils ont, mais ils veulent toujours plus ! Nous sommes tous issus du hip-hop, où la notion de défi est fondamentale, notamment à travers les battles. Alors j’ai posé la question suivante : à quel moment se satisfaiton de ce que l’on a ? » À travers ce voyage initiatique et introspectif, il explore un espace abstrait, hors du temps, où les corps s’abandonnent pour que les âmes se rencontrent. Mais Amala Dianor, n’a pas l’intention de s’arrêter là. Prochain objectif : renouer avec ses racines d’Afrique de l’Ouest, où il compte transmettre son expérience et son savoir faire. Et, comme il vise toujours plus haut, pourquoi pas prendre la direction d’une structure chorégraphique ? Télérama.fr, Bélinda Mathieu, 29 mars 2017.
Vincent Dupont, entre le merveilleux et l’inquiétant
Exposition au Centre chorégraphique national de Montpellier-ICI.
Le tout numérique n’aura pas eu raison de la singulière signature de Vincent Dupont. Pour l’artiste chorégraphe associé au CCN ICI, l’utilisation de la technologie sert davantage un propos artistique pertinent qu’une volonté de lier la forme au numérique à tout prix, comme il est en vogue. Dans la chambre d’écho, aménagée au rez-de-chaussée du centre chorégraphique par l’équipe de Christian Rizzo, l’exposition intitulée Cillement prolonge le propos chorérgaphique hors du plateau habituel. Dans l’obscurité, les visiteurs découvrent trois projections vidéo au rythme long. La décomposition infinie des mouvements captés lors des représentations de trois pièces de Vincent Dupont confère une tonalité nouvelle à chacune d’entre elle. Le costume folklorique autrichien, secoué dans Souffles, livre des détails passés inaperçus auparavant tout en se parant d’une aura mystérieuse. Sur un mur adjacent, un accent contemplatif accompagne le déploiement d’une intriguante forme orange : jamais le corps qui se trouve sous la couverture n’apparaît durant l’extrait. Les corps indivisibles et mirifiques de Cillement produisent des sons, par l’exhalation ou le tintinnabulemnet de clochettes d’un costume. Il semble s’être égaré au pays du Magicien d’Oz, entre le merveilleux et l’inquiétant. Géraldine Pingault, La Gazette de Montpellier, avril 2017.
POST
Avec POST, il était question de créer une pièce pour deux jongleurs et acteurs de cirque, à partir de notre pratique chorégraphique, sensible et inédite, le vol jonglé. Cette pratique collective, qui s’appuie sur la combinaison du déplacement et du jonglage, qui interroge la relation à l’autre, à l’espace et au temps, nous a conduit à mettre en relief un rapport obsessionnel, tant avec le jonglage qu’avec l’autre. Et à abandonner la forme même, ainsi que le nom même de vol jonglé, pour en garder l’essence : le potentiel dramatique de l’acte physique. Plus préoccupés de rapport sensible, de drame humain et de questions sur l’écriture que de surenchère ou de chorégraphie jonglée originale nous voulions interroger la mise en scène – dans le sens de la mise en espace, en temps, en lumière et en son – de deux jongleurs comme « deux humains, survivants de l’humanité, au beau milieu du vide, s’accrochant à leurs balles et à l’autre, comme les éléments essentiels à leur survie ». Interroger aussi l’idée de représentation, de spectacle, de cirque, de théâtre, de chorégraphie, d’écriture, d’improvisation, de jeu, d’interprétation, d’espace scénique, de rapport aux spectateurs… À la conception de ce spectacle, pas de thème ou de situation "a priori". Le propos découle de la pratique et du rapport physique entre les deux, rompant avec la staticité et la verticalité du corps du jongleur. Dans ce rapport physique, il est question d’interdépendance, de pression que l’on exerce sur l’autre, soit à vouloir être avec lui, soit à vouloir le quitter, rompant ainsi cette vitale dépendance, et laissant l’autre, à un moment peut-être inopportun, face à un vide sidéral et sidérant. Il découle aussi du rapport des corps ensemble et du rapport des spectateurs au temps, pénétrant les dynamiques du rythme, de l’étirement, du lien sensible de chacun à la durée et du rapport à l’espace, jouant des proximités, des verticalités, des vertiges, des forces naturelles (gravité, centrifuge), des contraintes, de la lumière et de ce que l’on donne à voir, jouant des impressions et des persistances. Mise en scène, scénographie et chorégraphie ne devaient faire qu’un. Son et lumière devaient être utilisés en tant que matières dynamiques et malléables, comme le jonglage, et se construire simultanément à l’écriture globale. Nous voulions aussi être radicalement minimalistes : une lumière crue avec 8 projecteurs en tout, pour un éclairage tout en clairs obscurs et en sources unilatérales, au service d’une certaine étrangeté dans la relation entre les deux protagonistes. Et donc interroger les codes de la représentation, le fil entre réel et fiction. Les acteurs – jongleurs ne jouent rien d’autres qu’eux même. L’idée de répétition d’une écriture est examinée, triturée : partition minutieuse et mécanique précise, répétée toujours à l’identique… ou performance, dans le sens d’action ou happening, donnant à voir un spectacle pour partie toujours différent… l’enjeu étant surtout l’écoute, l’instant présent, l’ici et maintenant. Tout doit être dans l’acte. Le laisser parler. Le laisser être. Ne pas ajouter d’intentions surfaites. Ne pas fermer l’imaginaire en imposant un sens ou une lecture uniques. Ne pas jouer à être, être. Ne pas jouer à faire, faire. L’idée d’exploit aussi est réinterrogée, resituée, oubliant un peu la surenchère et le crescendo habituels, retrouvant la notion de jeu et d’enjeu... Et pour trouver pour le jonglage un autre enjeu que celui de la réussite, nous nous sommes imposés un empêchement quasi total de jongler en s’attachant et en s’aveuglant (dans la logique du vol jonglé où la dissociation du regard sur le jonglage est un élément fondamental pour évoluer à plusieurs), replaçant l’enjeu du côté de l’endurance et du dépassement de la contrainte. Et puis… se laver de toute l’imagerie et de la nostalgie du cirque, du musicall aussi. Etre plus proches aussi des artistes ou des oeuvres contemporaines ou récentes qui nous inspirent, comme la musique post rock de Godspeed You ! Black Emperor et de Thee Silver Mount Zion, où le cinéma de Gus Van Sant... Nous voulions un objet en adéquation avec notre temps, moderne, et même postmoderne... Un objet qui reflèterait à la fois légèreté et mélancolie, qui ferait part de cette « irrémédiable solitude de l’être humain, en même temps que de l’interdépendance entre les hommes ». Un objet un peu aride, qui demande toute l’attention et la participation du spectateur. Une surface comme un désert. Des corps comme une scénographie. Et que l’on finisse enfin d’admirer la (seule) virtuosité pour ne plus se laisser traverser, émouvoir ou bouleverser que par la force poétique du mouvement, dans son abstraction pure, ou dans son évocation du théâtre de la vie... appelons ça comme on veut, mais un endroit résolument plus proche de Pina Bausch ou de Boris Charmatz, que du Cirque du Soleil.
CILLEMENT
CILLEMENT Installation photographique et vidéographique
Vincent Dupont explore l’acte chorégraphique dans son rapport à l’espace, au souffle, et à l’air, se servant de l’image comme un médium de dé[composition] du mouvement, du rythme et du cadre. Une immersion dans un rapport au temps qui ouvre de nouvelles perceptions sur le corps en jeu. « Le temps d’un cillement, face à cette césure avec laquelle nous frayons toutes les cinq secondes environ, créer des images qui repoussent cette cécité, pour permettre à l’oeil de faire face à ce qui, habituellement, lui échappe. Repousser ses propres réflexes physiologiques pour entrevoir quelque chose dans ce point d’aveuglement. » Vincent Dupont